La police grecque harcèle et menace les solidaires venus de France et de Belgique (témoignages)

Encore une nuit tendue autour d’Exarcheia, le quartier rebelle et solidaire d’Athènes.

LA POLICE GRECQUE HARCÈLE ET MENACE LES SOLIDAIRES VENUS DE FRANCE ET DE BELGIQUE (TÉMOIGNAGES)

Bien qu’annoncé en grande pompe depuis plus d’un mois par le nouveau premier ministre(1), l’assaut d’Exarcheia n’a pas encore eu lieu : les 2000 nouveaux voltigeurs prévus finissent de se préparer, le matériel de surveillance français est en cours de mise en place, l’asile universitaire vient d’être supprimé (privant les rebelles d’une zone de repli dans l’enceinte de l’école polytechnique, à l’ouest du quartier) et le code pénal est en train d’être modifié, avec des sanctions beaucoup plus lourdes pour toutes les formes de résistance, à commencer par la préparation, le port et l’usage de cocktails Molotov.

En attendant, la pression policière est de plus en plus forte. Les incursions intempestives dans Exarcheia se multiplient : avec des véhicules blindés transportant des policiers en gilets pare-balles avec des armes lourdes prêtes à tirer. L’État grec profite de la baisse vertigineuse de population au mois d’août dans la capitale pour prendre ses marques et habituer progressivement les regards à la présence régulière de la police dans le quartier, chose sans précédent.

Et puis, surtout : le pouvoir semble vouloir dissuader les solidaires d’autres pays de venir soutenir le mouvement social à Exarcheia. Plusieurs Français, Belges, Suisses, Allemands et Espagnols, arrivés ces derniers jours, ont été harcelés, menacés, arrêtés et parfois frappés, dans un but évident d’intimidation.

Voici deux témoignages transmis par Seb (venu de Belgique) et Léon (venu de France).

Bonne journée à celles et ceux qui se lèvent.

Y.Y.

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1- « HISTOIRE D’UNE ARRESTATION TRAUMATISANTE PAR LA BRIGADE ANTI-TERRORISTE (OPKE) À EXARCHEIA

Je suis belge et actuellement dans le quartier d’Exarcheia pour défendre un lieu sous pression policière de plus en plus grande du fait du nouveau gouvernement de droite dure qui n’hésite pas à reprendre les discours d’extrême-droite.

Ce lieu est l’un de ceux où l’autogestion fonctionne, où la solidarité est une arme et où de nombreuses personnes exilées de différents pays résident paisiblement.

Cet après-midi, un banal contrôle de rue par les renseignements généraux (appelé ici « asfalitès », c’est-à-dire des policiers en civil tournant dans le quartier) s’est transformé en une arrestation brutale par la police anti-terroriste (OPKE). Nous n’avions pas nos papiers sur nous. Dans certains cas, il vaut mieux. Panique et peur m’ont envahit devant la violence de l’assaut. Les menottes dont je porte encore les traces m’ont mises dans un état psychologique second.

Les policiers violents et suréquipés nous ont embarqués dans un 4×4 noir, tout comme leurs regards. Devant leur agressivité, par réflexe quasi instinctif, j’ai voulu sortir de la voiture. Ayant été arrêté avec un camarade Français, nous étions menottés l’un à l’autre. Un flic de l’anti-terrorisme m’a alors mis un coup violent au visage. Nous avons été ensuite emmenés à grande vitesse, sirènes de police en prime au commissariat le plus proche.

Interrogatoire à l’entrée du commissariat : les flics tentent de nous intimider et nous demandent si nous sommes effrayés. Ils prennent notre identité, celles de nos parents, notre date de naissance et notre ville de résidence. À Exarcheia et même ailleurs, c’est une sorte de drôle de guerre. Une guerre psychologique entre la police et les anarchistes.

La répression est de plus en plus présente dans le quartier, la résistance mondiale face à ce monde qui veut faire de nous de bons soldats doit s’organiser.

Quoi qu’il arrive, nous devons désobéir. Pour nous, pour l’humanité, pour la résistance à un monde qui s’écroule et dont nous n’avons pas peur. Que vive l’anarchie, l’autogestion ! À mort tous les états et leur monde !

Merci aux camarades d’Exarcheia pour leur soutien moral.

Seb (venu de Belgique, et déjà venu à Exarcheia lors d’un convoi solidaire par le passé) »

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2- TÉMOIGNAGE DE L’AUTRE CAMARADE ARRÊTÉ

« Nous avons été contrôlé dans une rue d’Exarcheia. Deux personnes en civil, sur un vieux scooter s’approchent de nous. Ils sortent une carte de police et décident de nous contrôler. Nous ne comprenons pas bien. Les policiers n’avaient absolument aucun signe distinctif et nous ont surpris.

Nous n’avons pas nos papiers sur nous. Les policiers passent un coup de fil et nous font patienter : « c’est juste pour un petit contrôle d’identité. »

Mais peu après, un 4×4 noir arrive à toute vitesse. 3 policiers suréquipés sortent de la voiture et en 30 secondes, nous sommes menottés et jetés dans la voiture avec violence. Le camarade avec qui j’étais à eu le droit à un coup de poing en pleine tête pour avoir un peu paniqué. À raison, puisque les policiers surarmés se sont révélés être de la brigade anti-terroriste.

Nous demandons ce qui se passe. On nous répond qu’il vaut mieux ne pas poser de question. Le flic a côté de moi me tient la cuisse avec sa main et me fait sentir son agressivité. On nous menace, on nous dit qu’on risque de prendre un an de prison ou même deux, qu’on ne pourra pas quitter la Grèce de si tôt.

Finalement, on nous conduit dans le comico voisin et l’absurdité de l’arrestation se confirme puisque nous sortirons environ une heure plus tard.

La situation à Exarcheia est de plus en plus tendue. De rapides opérations de police ont lieu quasiment tout les jours. les renseignements rôdent dans Exarcheia, le plus souvent en faux taxi ou à deux roues. Ils cherchent à nous provoquer et à nous intimider. Ce qui nous est arrivé est un exemple parmi d’autres.

Mais le monde nous appartient, qu’ils le veuillent ou non.

Léon (venu de France) »

(1) http://blogyy.net/2019/07/31/grece-la-chasse-aux-anarchistes-est-ouverte/