Médias de masse : l’art d’inverser les rôles

1- Newsite titre : « Rouvikonas frappe le restaurant de Botrini.»

2- Puis, en guise d’illustration, Newsite associe une photo sympa du restaurateur souriant et un gros plan de corps humain blessé.

Dites-moi : qu’est-ce que vous comprenez, uniquement avec ces éléments, entre des dizaines d’autres lectures survolées en vitesse avant de faire autre chose, comme 80% des lecteurs ?

Bien sûr, vous vous vous dites que Rouvikonas n’a pas seulement frappé au sens figuré, mais aussi au sens propre. Apparemment, le brave entrepreneur souriant a été blessé par le groupe anarchiste et c’est son corps qui est meurtri.

Et bien non. La réalité est toute autre. C’est même tout le contraire.

Le restaurateur Hector Botrini est au cœur d’une affaire de violences physiques et psychologiques graves sur plusieurs de ses employé.es. L’un de ses apprentis, âgé de 19 ans, l’accuse même de tortures : coups de pied, gifles, mais aussi huile bouillante sur le bras et la jambe, ou encore application d’une spatule brûlante sur la peau…

Hector Botrini fait travailler ses employés 12 à 13 heures par jour pour un salaire de misère, bien que les touristes paient le prix fort dans ses restaurants. Il ne les laisse boire de l’eau que pendant de rares pauses alors qu’ils travaillent dans des températures élevés, et ne leur fournit qu’un seul et maigre repas par jour.

Vous l’avez donc compris, la photo de droite n’est pas celle du restaurateur qui, en l’occurrence, n’a pas été blessé, mais de son apprenti, c’est-à-dire le corps de la victime de ses tortures incessantes.

Le titre qui associe le verbe frapper à Rouvikonas vise également à provoquer la confusion et le contresens pour les lectures rapides.

En réalité, Rouvikonas n’a frappé personne. Le groupe basé à Exarcheia s’est déplacé tôt ce matin à Chalandri, alors qu’il faisait encore nuit, pour enfoncer la porte principale d’un des restaurants d’Hector Botrini et l’éclabousser de peinture rouge comme le sang qu’il a fait couler.

Décidément, les médias de masse ont l’art d’inverser les rôles. C’est même leur principale fonction : nous faire voir le monde à l’envers et, ainsi, nous déplacer dans le camp de ceux qui nous oppriment.

Le pouvoir n’est pas le seul à combattre, les médias qui le servent le sont également.

Yannis Youlountas

#Rouvikonas_resist #Exarcheia_resist