La tension monte à Athènes
On vous parle d’amélioration et d’accalmie en Grèce ? N’en croyez rien. C’est tout le contraire.
LA TENSION MONTE À ATHÈNES
La soirée promet d’être chaude et les prochains jours également. Vous voulez une raison ? Je vous en donne huit :
1- Cette nuit, à 3h20 du matin, des fascistes ont attaqué le célèbre squat antifasciste Distomo, symbole de la reconquête de la place Agia Pantelemonas, ancien épicentre du fascisme à Athènes il y a trois ans. Les néo-nazis ont utilisé exactement le même procédé que durant leur attaque incendiaire nocturne du squat de réfugiés Notara 26 l’année dernière, en l’occurrence des petites bonbonnes de gaz. Pas de blessé, peu de dégât, mais une grosse envie de riposte chez nos camarades.
2- Cet après-midi, la manif étudiante et lycéenne a donné le ton, avec plus d’intensité que d’habitude (cf. les photos de mon camarade et ami Marios Lolos), en prélude à la grande manif de ce soir, « déconseillée aux âmes sensibles » comme préviennent certain-e-s en paraphrasant les annonces de films.
3- A partir de demain débarque… Erdogan à Athènes ! Nos camarades grec-que-s et surtout migrant-e-s sont très remonté-e-s contre le dictateur turc qui fait vivre l’enfer aux personnes vulnérables qui passent sur « son » territoire ou, pire encore, qui y sont renvoyées par les autorités grecques (depuis l’accord UE-Turquie de mars 2016). Les Kurdes, Syriens et Irakiens sont particulièrement en colère du tapis rouge qui va être déroulé par Tsipras, une fois de plus.
4- Nos prisonniers politiques Pola Roupa et Nikos Maziotis, anarchistes révolutionnaires, sont en grève de la faim depuis le 11 novembre à cause du durcissement de leurs conditions de détention (notamment l’isolement renforcé de Nikos et leurs difficultés à voir leur fils qui s’apparente à de la torture mentale). Leur état de santé s’est encore dégradé et ils ont été hospitalisés contre leur volonté. Cependant, les médecins n’ont pas obéit aux directives policières et ont refusé de les nourrir de force avec du sérum. La réaction dans les réseaux anarchistes et révolutionnaires devient particulièrement explosive.
5- Ces jours-ci également, le gouvernement veut limiter le droit de grève, provoquant la colère des syndicats qui ont aussitôt annoncé une nouvelle grève générale pour le 14 décembre, et encore d’autres si nécessaires.
6- Les affrontements autour des tentatives de ventes aux enchères des maisons de familles surendettées, expulsées dans des conditions inhumaines, se durcissent, surtout avec la volonté de l’Etat d’utiliser les ventes électroniques. Même les notaires commencent à se rebiffer (grève à Thessalonique), c’est pour dire !
7- Le groupe anarchiste Rouvikonas (Rubicon), toujours très actif et décidément impossible à stopper, vient d’attaquer cette fois la société nauséabonde du cousin du ministre des finances Syriza, récemment démasquée pour se faire un maximum de fric sur le dos des surendettés. Rouvikonas a détruit les fenêtres et surtout les ordinateurs et les archives numériques. La plupart des victimes n’arrivaient plus à payer leurs factures d’électricité à la veille de l’hiver et risquaient d’être expulsées.
8- Le 17 novembre dernier, il y avait 7000 policiers au centre-ville d’Athènes. Ce 6 décembre, on parle de 10 000 flics sur le pied de guerre, sans compter les innombrables indics et flics en civils, ambiance « guerre froide » tant ils sont partout et peu discrets.
Non, vraiment, il n’y a aucune véritable amélioration et la révolte gronde à nouveau de plus en plus.
Rien n’est fini en Grèce. Neuf ans après les émeutes de décembre 2008, les braises brûlent encore.
Yannis Youlountas
Photos : Marios Lolos