Reprendre les rues commence par les murs

La semaine dernière, au milieu de la nuit, j’ai participé à une petite opération de ravalement des rues d’Athènes, notamment dans des zones tenues par les identitaires et Aube dorée.

REPRENDRE LES RUES COMMENCE PAR LES MURS

Se retrouver entre compagnons de lutte pour aller virer les lambdas et méandres, détourner les croix gammées et celtiques, est un vrai plaisir. Nos interventions s’agrémentent parfois d’ajouts, de blagues ou de dédicaces, comme ici un petit hommage perso à mes camarades de Rouvikonas (Rubicon) sans cesse poursuivis et sanctionnés pour leurs actions coups de poing contre le pouvoir, mais qui continuent sans relâche.

Dans ces moments là, on a aussi une pensée pour les victimes des fascistes dans ces mêmes rues sombres : inquiétées, agressées, frappées ou poignardées, au prétexte de leur couleur de peau, de leur tenue vestimentaire ou de leur religion.

A cause de quoi, de qui ? A cause de tous ceux qui soufflent sur les braises et attisent la haine contre les migrants, les homos, les juifs, les musulmans et tant d’autres.

C’est pourquoi les petits bobos du racisme newlook en lunettes noires ne valent pas mieux que les brutes néo-nazies, car ils répandent le même poison. Leur propagande mortifère divise pareillement les opprimés, en désignant des boucs-émissaires et en affaiblissant les mobilisations contre les causes réelles.

Le fascisme, même parfumé en Kenzo ou Azzaro, reste du fascisme. La puanteur des cadavres n’est pas loin, elle est juste camouflée.

De même, il est vain d’attendre quelque chose du pouvoir : les fascistes, quels que soient leurs masques, ne sont jamais vraiment inquiétés parce qu’ils sont ses rabatteurs — certains complices, d’autres naïfs — et parfois même ses hommes de mains.

C’est à nous, solidaires et déterminés, de les combattre, de les repousser, de les bloquer, de les ridiculiser, de démonter leurs discours, de dévoiler leurs actes, de dégonfler leurs baudruches, de les repousser aux abords des facs et à la sortie des lycées, dans les usines, les manifs, les quartiers et jusqu’au dernier graffiti.

La moindre affiche non décollée ou non détournée, le moindre tag oublié sur une routes passante est un signe de démission, de lâcheté, d’acceptation. A l’inverse, nos détournements un peu partout dans les villes montrent aux victimes passées ou potentielles qu’elles ne sont pas seules dans l’adversité.

Reprendre les rues commence par les murs.

Yannis Youlountas