Sortir la tête de l’eau avant de bâtir autre chose
Réponse à un ami s’interrogeant sur un message venu de Grèce plus préoccupé par le souci d’exister, de survivre, que par celui d’être et de s’émanciper politiquement.
« SORTIR LA TÊTE DE L’EAU
AVANT DE BÂTIR AUTRE CHOSE. »
Beaucoup de personnes en Grèce sont dans une situation tellement difficile, ou environnées d’un tel enfer d’existences, qu’elles aspirent d’abord à une amélioration concrète et matérielle de la vie, et même tout simplement à la survie.
Je sais que c’est parfois difficile à comprendre vu de France, notamment dans certains milieux qui ont des opinions sympathiques, des positions fraternelles, mais qui ne savent pas ce qu’est souffrir. Souffrir vraiment. Avoir faim. Vraiment faim. Des gens m’ont dit, la semaine dernière près du centre Athènes : « Yannis, t’es sympa, mais on veut bouffer, arrête ta politique ! C’est sûr, ça serait bien un politique sociale de gauche, une démocratie directe libertaire, (…) mais ce qu’on veut, l’ami, c’est AVOIR DE QUOI MANGER SANS S’INQUIÉTER SANS ARRÊT DU LENDEMAIN OU DE LA SEMAINE PROCHAINE.
Quand l’estomac et l’anxiété parlent aussi fort, quand ils crient même, il est impossible de voir plus loin. Ces sœurs et frères humains y reviennent tout le temps : « et demain, si on ose ce que tu dis, comment on fait ? Comment on survit ? »
Et de rajouter : « il est indispensable de sortir de l’eau avant de bâtir autre chose. »
Je vous assure, mes ami-e-s, compagnons ou camarades, que ça donne à réfléchir sur nos belles théories, à l’épreuve du terrain de la lutte. De la lutte pour la vie. De la lutte pour la survie.
C’est ça aussi, la Grèce, en 2015.
Y.Y.
Photo : extrait de « Je lutte donc je suis » (film en préparation).