Un procès bizarre et un verdict qui sera rendu le 22 octobre

Quelques mots vite parce que je dois ensuite reprendre la route pour aller faire des ateliers philo demain matin, avec des écoliers et des collégiens dans le Tarn.

UN PROCÈS BIZARRE ET UN VERDICT QUI SERA RENDU LE 22 OCTOBRE

Vous étiez nombreux aujourd’hui à Aix juste avant le procès, mais malheureusement l’immense majorité n’a pas pu trouver de place à l’audience : comme souvent pour les affaires politiques tendues, nous étions confinés dans la plus petite salle de la Cour d’Appel, alors que nous avions, de loin, le plus besoin de sièges !

Aucun identitaire n’était là, comme souvent. Pas l’ombre d’un chef ni le moindre abruti chasseur de migrants. Pourtant la devise de Génération Identitaire à son camp d’été, c’était précisément la phrase d’Homère : « Du combat, seuls les lâches s’écartent ». C’était même floqué sur leur nouveau tee-shirt bleu-chiotte. Alors quoi ? Soit ces surhommes de la race pure ne savent pas lire le français, soit ils ont compris à l’envers la phrase de Homère en fuyant ce nouveau face à face au tribunal. A croire que Defend Europe, c’est juste Defend mon petit cul.

Autre bizarrerie : dès le début de l’audience, je n’ai quasiment pas pu m’exprimer sur mes raisons valables d’utiliser le mot « nazi ». Soit-disant c’était « trop politique ». Trop politique ? Ben oui, c’est politique ! Complètement politique ! Je n’ai pas écrit nazi pour rigoler, du moins ce n’était pas ma raison principale. C’était d’abord appeler un chat un chat. Oui, le mouvement Defend Europe mérite, parmi d’autres qualificatifs, celui-là. Oui, parfaitement, je persiste et je signe !

Le parcours nazi de nombreux chefs identitaires n’est pas un secret : même Martin Sellner, l’un des porte-parole de Defend Europe l’a reconnu à plusieurs reprises, sous la pression des médias autrichiens et allemands. Les financements du Klu klux klan et des néonazis américains non plus. Les voyages de soutien d’un porte-parole de Defend Europe à Charlottesville auprès des organisateurs nazis également. La filiation avec les Jeunesses Identitaires dissoutes et auparavant Unité Radicale est avérée. Les fondations idéologiques de cette structure basées essentiellement sur la doctrine de l’ancien SS St-Loup et d’autres nostalgiques du Reich sont irréfutables. L’iconographie et le symbolisme sont parlants en beaucoup de points. Le concept même de Défend Europe n’est que la resucée du vieux Defend Europe anti-bolchévique, anti-juif et anti « races inférieures » des nazis et de leurs alliés collabos dans l’Europe brune (quelques affiches d’époque parmi les pièces jointes). Il s’agit bien, là encore, non pas d’un fascisme national, mais d’un fascisme continental, dont le cœur du projet est de « défendre » toute l’Europe (blanche ou aryenne, fille de Zeus ou d’Odin) face à une menace imaginaire. Bref, mes preuves ne manquent pas. Et avec ça, je vous fais un paquet cadeau ?

Mais ces preuves, je n’ai quasiment pas pu les exposer ou presque, interrompu dès le début et encore deux fois par la suite. Était-ce parce que ce n’était pas nécessaire et que la cour connaissait déjà mes arguments notifiés dans le dossier du premier jugement ? Je ne sais pas. Je l’espère. Mais cela fait tout de même bizarre de ne pas pouvoir se défendre sur l’essentiel. Car l’essentiel est bien politique : les identitaires ont commis le projet monstreux d’affréter un bateau pour aller empêcher des sauvetages de mômes bazanés parce qu’ils ne sont « pas de chez nous ». Pas plus tard que mercredi dernier, à Lyon, un cadre de ces mêmes identitaires a pris deux ans fermes pour avoir poignardé dans le dos deux lycéens mineurs. Si ça, c’est pas politique, et si c’est pas du fascisme de la pire espèce, alors, qu’est-ce que c’est ?

Oui, notre but, avec d’autres camarades, c’est de contribuer à dissoudre Génération Identitaire, de protéger les exilé.es, de faire relaxer les autres militants poursuivis, et de répondre à la « peur de l’autre » distillée un peu partout par l’inverse : la raison, l’empathie, l’entraide et la solidarité. Et puis, surtout, ne pas laisser faire !

L’avocat des identitaires — identitaire lui-même — a dit sur un ton volontairement dramatique : « Youlountas n’est pas seulement un animateur de goûter-philo mignons (sic) avec des enfants, c’est… un antifa ! Oui, je vous le dis (en se répétant), c’est UN ANTIFA !!!!! » (effroi dans sa voix et ses yeux exorbités)

Oui, je suis un antifa et tes potes ont raison de me craindre et de craindre tous les antifascistes, car nous ne vous laisserons pas faire. Nous ne vous laisserons jamais faire. Nous ne faisons pas non plus confiance à l’État pour défendre les opprimé-e-s, car il est également l’un de leurs principaux oppresseurs : on ne peut prétendre défendre les opprimés quand les inégalités sociales sont si grandes et les violences quotidiennes si nombreuses dans toutes les phases de l’existence.

C’est pourquoi je ne suis pas seulement antifa, mais également anarchiste, éducateur, auteur et réalisateur : parce que c’est tout un monde qui est à transformer et non pas seulement le fascisme à repousser. Le fascisme n’est que le pire produit du capitalisme et de la société autoritaire. Ce sont donc ces modes de production et d’organisation qu’il faut balayer, et pas seulement le monstre qu’ils enfantent sans cesse.

Outre révéler que j’étais un antifa (brrr… quelle angoisse !!!), l’avocat des identitaires, un certain maître Lambert, a essayé de semer la confusion en faisant croire, alors que je ne pouvais pas reprendre la parole, que mon emploi du mot nazi n’était que satirique (tombant dès lors sous le coup de l’injure alors que j’avais tenté sans succès de m’en expliquer clairement en proposant l’argumentaire inverse au tout début, preuves à l’appui, mais interrompu). Bref, j’étais piégé dans le cadre chronologique de l’audience. En plus, il racontait n’importe quoi au sujet d’une photo en cause (autre chef d’accusation) qui elle, à l’inverse, était purement satirique, comme beaucoup des montages que j’avais créé et diffusé avec mes camarades pour ridiculiser la propagande de Defend Europe. Bref, c’était du grand n’importe quoi ! L’avocat adverse feignait de répondre à ce qui m’était passé sous le nez !

Pire encore, l’avocat général s’est ensuite permis d’intervenir « à titre personnel » pour appeler à me sanctionner sur un chef d’accusation qui ne le concernait pas, puisque ma citation n’était plus au pénal cette fois, mais au civil, après ma relaxe en première instance ! Bizarre. Vous avez dit bizarre ? Comme c’est bizarre !

Heureusement, Jean-Jacques s’est défendu comme un lion, quoiqu’un peu sur la défensive. Toujours aussi drôle et simple à la fois, tendre et jovial, gros nounours redskin forever  Le procureur a tout de même requis deux mois avec sursis (plus les amendes, dommages et frais). Mais la relaxe est peut-être possible… Si toutes celles et ceux qui se mettent en colère sur Facebook juste après chaque crime fasciste se prennent pour cela de la taule avec sursis, on va vite se retrouver avec des millions de gens sous les verrous !

Dominique Tricaud, notre avocat, celui qui battu Val (en défendant Siné), qui a laminé Ayoub et bien d’autres, et qui avait brillamment défendu La Rumeur sur la liberté d’expression, a encore été excellent comme d’hab’. Il faut dire qu’outre son brio, il y a aussi le travail de l’ombre de son assistant Matteo Bonnaglia qui a préparé lui aussi des flèches du tonnerre !

Avec tout ça, on espère encore gagner, mais j’avoue que mon sentiment est partagé. J’ai trouvé ce procès bizarre. Et je ne suis pas le seul. Certains restent optimistes cependant, mais d’autres se questionnent. Pas d’inquiétude : on va attendre tranquillement le 22 octobre et on verra bien !

Merci encore à toutes celles et ceux qui sont venues. Désolé pour le faible nombre de places ! Merci pour les nombreux SMS, messengers, mails, etc. Merci pour le soutien financier sur notre pot commun ou via le cercle. Merci en particulier aux assos locales : Les déconommistes d’Aix, l’AFA Marseille, le Front social 13, radio zinzine, le SEL de Rognes, le CIRA de Marseille, les compagnons des convois venus nombreux, Cédric Herrou* toujours en soutien (et réciproquement) et d’autres ami.es de la Roya citoyenne, des copains franco-grecs, des ami.es d’enfance, des compagnons anars de longue date, des éducs antiautoritaires, des enseignants de l’ICEM-Pédagogie Freinet, et beaucoup d’autres qui ne me viennent pas à l’esprit dans l’urgence, mais que j’embrasse également très fort alors que je dois vite reprendre la route pour arriver à dormir un peu cette nuit.

Maintenant commence l’attente.

Soutien à toutes celles et ceux qui luttent et n’acceptent pas le monde tel qu’on veut nous l’imposer

Encore merci de leur soutien et de leur aide précieuse à mes compagnons de Defend Mediterranea, de la Horde let de l’Épire contre attaque

Solidairement et amicalement,

Yannis Youlountas

https://youtube.com/watch?v=S2m80VMk2eU

* Une pensée pour Cédric qui s’est fait agressé hier soir à Valence par des abrutis qui portaient des fringues au logo de Génération Identitaire (encore), devant le cinéma de l’ami Cyril. Cédric raconte ce qui s’est passé ici :
https://www.facebook.com/HerrouCedric/posts/2012576048986950
Du coup, j’ai échangé avec lui sur les précautions que je prends avec Maud depuis plusieurs années contre les tentatives de guet-apens — chose difficile quand nos ennemis politiques connaissent aisément nos dates et heures de passage et cherchent parfois à nous intimider, soit en public, soit de façon plus menaçante à la fin de la soirée, par exemple aux alentours du parking quand la nuit est tombée et qu’il n’y a plus personne.

Merci à Lucie Alenda et Constant Kaimakis pour les premières photos.

* Une pensée pour Cédric qui s’est fait agressé hier soir par des abrutis qui portaient des fringues au logo de Génération Identitaire à Valence, devant le cinéma de l’ami Cyril. Cédric raconte ce qui s’est passé ici :

https://www.facebook.com/HerrouCedric/posts/2012576048986950
Du coup, j’ai échangé avec lui sur les précautions que je prends avec Maud depuis plusieurs années contre les tentatives de guet-apens — chose difficile quand nos ennemis politiques connaissent aisément nos dates et heures de passage et cherchent parfois à nous intimider soit en public, soit de façon plus menaçante à la fin de la soirée, par exemple aux alentours du parking quand la nuit est tombée et qu’il n’y a plus personne.

Merci à Lucie Alenda et Constant Kaimakis pour les premières photos.