Le mauvais exemple grec

Suite à mon article, ce midi, sur l’énorme désinformation de l’AFP Athènes(1), on me demande pourquoi les dirigeants occidentaux essaieraient-ils de mettre sous silence l’offensive qui vise à en finir avec les bouillonnants anarchistes grecs ?

LE MAUVAISE EXEMPLE GREC

Je vais vous le dire : tout simplement parce que ce sont eux, les cadors de Bruxelles, qui sont à l’origine de cette offensive.

Il y a quelques mois les dirigeants européens avaient, de notoriété publique, interpellé plusieurs fois Tsipras et son entourage sur le mauvais exemple propagé par Exarcheia et Rouvikonas en Europe. Cette information avait largement circulé à l’époque. Elle était sérieuse. Elle reprochait plus précisément à l’État grec de n’être pas assez sévère et rigoureux dans son contrôle de la situation, localement et par conséquent dans l’imaginaire social, dix ans après les émeutes de 2008 et 45 ans après la fin de la Junte des colonels. D’ailleurs, peu après ces critiques, le candidat de la droite grecque, Kyriakos Mitsotakis, s’était lancé dans une véritable surenchère de promesses quant au nettoyage « en un mois » d’Exarcheia et au démantèlement de Rouvikonas dès son arrivée au pouvoir.

À son tour, au tout début de la dernière campagne électorale, Tsipras s’est mis à évacuer plusieurs squats d’Exarcheia et alentours, et a été beaucoup plus dur avec Rouvikonas que dans les années précédentes.

Avec le même objectif de séduction, Tsipras a signé de nombreux cadeaux à des grands groupes financiers dans sa dernière période au pouvoir, de façon à donner des gages à ceux qui le trouvaient trop lent : nouvelles concessions pétrolières à Total et Exxon au large de la Crète, adoption finale au parlement du projet d’aéroport de Kastelli, multiples offrandes aux grandes firmes… Il a même fait un interview de larbin dans le grand Financial Times pour promettre de nouvelles « réformes »(2), six semaines avant l’élection.

Au final, la droite est revenue aux affaires le 7 juillet, avec le mandat de mener la même politique économique tout en amplifiant les privatisations, la vente du bien commun et la destruction du service public, et surtout de préparer une véritable chasse aux anarchistes(3) et autres révolutionnaires.

Si l’objectif est aujourd’hui d’en finir avec le mauvais exemple grec en Europe, il est donc logique de ne pas trop ébruiter le grand « nettoyage » qui se prépare, au risque de fabriquer de la compassion ou même du soutien.

Il n’y a rien de pire pour le pouvoir que de laisser voir qu’on peut se passer de lui.

Yannis Youlountas

(1) L’AFP Athènes prise, hier, la main dans le sac :
http://blogyy.net/2019/08/08/lafp-athenes-prise-la-main-dans-le-sac/
(2) Tsipras le 20 mai 2019 dans le Financial Times : « We need more reforms »
https://www.ft.com/content/b797dea2-4a27-11e9-bde6-79eaea5acb64
(3) Grèce : la chasse aux anarchistes est ouverte
http://blogyy.net/2019/07/31/grece-la-chasse-aux-anarchistes-est-ouverte/