Comment les bobo-journalistes se moquent de nous ? Un exemple.

Parmi le feu d’artifice d’articles vomitifs sur la pseudo « renaissance grecque grâce à la cure d’austérité », on vient de me transmettre un reportage en Grèce du magazine suisse « l’Hebdo ».

QUAND LE BOBO-JOURNALISME S’ÉBAHIT DES FRASQUES LUXUEUSES DE LA HAUTE-BOURGEOISIE ATHÉNIENNE

On ne va pas s’amuser à faire ça pour chacun des articles des mass-médias occidentaux, mais puisque plusieurs camarades m’ont interpellé sur celui-là (dont mon ami Constant Kaimakis), prenons 5 petites minutes ensemble pour découper celui-là au scalpel, à titre d’exemple (bouchez vous le nez).

Déjà, le choix du titre est évocateur : « A Athènes, les dieux retrouvent le sourire »*. Ben oui. Si l’on prend la métaphore au premier degré, l’auteur (Richard Werly) ne ment pas : la situation profite pleinement aux riches et aux banques, comme d’hab’. Par contre, il serait bon de préciser : il n’y a que les dieux du fric qui sourient, et même qui se marrent. Pour le commun des mortels, ça ne va pas du tout mieux.

Mais c’est bien la voie du mensonge implicite qui est choisie dès l’introduction, résumant en quelques mots la mission sur commande de Richard Werly : « Reportage sur un début de renaissance porteur d’espoir. »

Pardon ? Parler de « renaissance » en Grèce ? En pleine guerre économique et sociale ? Au milieu d’une désastre humain et environnemental ? En plein bras de fer entre diverses formes de résistances et un gouvernement de collaboration ?

Comme tous ses petits copains bobo-journalistes, Richard Werly a trouvé la solution pour atteindre son objectif : consacrer 90% de son reportage aux frasques luxueuses de la bourgeoisie, et même de la haute-bourgeoisie athénienne.

Richard Werly dans le texte (extraits) :
– « D’énormes infrastructures culturelles privées, comme la Fondation Niarchos, le Centre Onassis ou le Musée d’art moderne, ont fini par émerger des ruines de la crise. Une Athènes nouvelle, dynamique, symbole d’une renaissance de l’Europe créative, profite de ces bouffées d’oxygène. »
– « Un couple de Suisses, conduit par un agent immobilier grec francophone, est assis sur la terrasse du café-librairie Little Tree, ouvert voilà six mois par Eri et deux de ses amies. La jeune femme, architecte de formation, a eu l’idée de remplacer la boutique de souvenirs de l’un de ses proches par ce lieu convivial, intello comme il faut. »
– « Fin de parcours au Parthénon. Vue de la superbe terrasse du Centre culturel Niarchos. Maria Katsariou Vafiadis ne se lasse pas de scruter les colonnes qui se découpent au loin. Patronne du très prisé cabinet MKV, cette spécialiste du design hôtelier débarque de Londres, ville qui l’a vue s’installer après un crochet par Lucerne, où travaille son équipe en Suisse. »

Richard Werly citant ses nouveaux copains :
– « la crise nous a tous rendus humbles. Nous en avions besoin » (Yannis Fokas, milliardaire grec, propriétaire des hôtels de luxe Electra)
– « Le fait que les plus grands armateurs soient allés de l’avant, avec leurs projets en pleine crise, fixe un cap collectif » (Helena, guide du nouveau Musée d’art moderne)
– « l’agriculture grecque est un filon inexploité. Déficit d’image, d’emballage, de marketing » (conseils de la Troïka)

Le glossaire de Richard Werly en dit long également :
– il parle de la situation « anarchique » de la ville, entretenant la confusion anarchie = chaos, comme tout bon journaliste au service du pouvoir, alors qu’il aurait pu choisir parmi une dizaine de synonymes plus appropriés.
– il fait une faute d’orthographe à Exarcheia, en l’écrivant Exarchia, comme tous les détracteurs du quartier, vrais ennemis ou faux amis (un camarade d’Exarcheia a d’ailleurs écrit, dans un texte récent sur le quartier, que « cette faute d’orthographe est souvent annonciatrice » du contenu mensonger d’un article : « la plupart du temps dès qu’on a lu le choix orthographique du titre, on sait à quoi s’en tenir »).
– il flatte « la prestigieuse Brookings Institution de Washington », think thank de la haute-bourgeoisie dans la capitale américaine.

Bref, derrière les mots, Richard Werly, nous dit tout simplement : « Tout va mieux en Grèce pour les riches. »

Merci bien. On avait compris.

Yannis Youlountas

A noter : un ami journaliste (j’en ai, mais uniquement parmi les vrais journalistes qui font courageusement leur boulot, incorruptibles et indépendants, à la différence de la majorité de cireurs de pompes au service de ceux qui remplissent leur gamelle) vient de me faire savoir que Richard Werly, actuellement correspondant du Temps à Paris, est un soutien affiché de Macron. Un petit tour sur twitter m’a permis de le vérifier (cf. copies d’écran). Cela ne fait que confirmer l’autopsie de son papier cadavérique.

http://www.hebdo.ch/hebdo/cadrages/detail/athènes-les-dieux-retrouvent-le-sourire